Itinéraire d'une véritable légende vivante : Maceo, le dernier ambassadeur du Funk…
À la question "Comment êtes-vous devenu une légende ?", Maceo répond en riant "Pour commencer, vous avez intérêt à vivre longtemps ! "Parce que le temps passe, que les styles musicaux changent, et que la relève se fait rare, Maceo compte parmi les derniers rares artistes encore inventifs et actifs, de l’authentique courant Funk des années 70.
Avec plus de 200 concerts par an et d'une durée moyenne de 2h30 chacun, il parcourt le monde entier inlassablement, accompagné de musiciens aux références funky sans équivoque, et permet ainsi à un maximum de spectateurs de vivre avec eux sa musique. Maceo a su conquérir les oreilles et le coeur de plusieurs générations, et toujours plus nombreux, les fans de l’époque se mélangent aux fans d’aujourd’hui. Tous se réunissent pour profiter de ces moments privilégiés offerts par le dernier ambassadeur du Funk.
Cette biographie est découpée en 4 parties : ses débuts à Kinston, les années James Brown où son talent sera immédiatement révélé, puis les suivantes où il multipliera les rencontres musicales toutes plus riches les unes que les autres pour enfin se consacrer à sa carrière solo.
Kinston... 1951
Agé de 8 ans, Maceo apprend le saxophone. Chez les Parker, la musique règne : son père joue de la batterie, du piano et chante avec sa femme dans la chorale d'une église, tandis que ses frères Melvin et Kellis jouent respectivement de la batterie et du trombone. Quelques temps plus tard, c'est l'oncle Parker lui même leader du "Bobby Butler & the Myghty Blue Notes" qui motive les 3 frères a monter leur groupe "Junior Blue Notes" et les initie à la scène lors de ses propres concerts en leur cédant la place entre deux sets. Cette première expérience avec le public est déterminante pour Maceo qui découvre une véritable vocation. Il grandit en admirant des saxophonistes comme David "Fathead" Newman, Hank Crawford, Cannonball Adderley, King Curtis... "J'étais fou de Ray Charles et de ses musiciens, particulièrement les saxophonistes". C'était sans imaginer que 50 ans plus tard, il consacrerait l'une de ses tournées (avec le WDR), l'un de ses albums et l'un de ses dvd à un hommage à son idole.
LES ANNEES BROWN : "comme à l'Université"
En 1964, Maceo et Melvin Parker étudient à l'université en Caroline du Nord lorsque le grand frère fait une rencontre avec un certain James... James Brown. Ce soir là, Melvin donne un concert dans un club avec son groupe "Apex" à Greenville quant le GodFather of Soul entre dans l'établissement pour se restaurer après avoir donné un spectacle non loin de là. Surpris par la qualité de jeu du batteur, il propose à Melvin d'être son batteur lors d'un prochain concert. Melvin refuse puisqu'il est encore étudiant : James lui rétorque que tout ce qu'il aura à faire sera de rafraîchir sa mémoire quand il aura terminé et le job sera le sien... Un an plus tard, James Brown est en tournée en Caroline du Nord. Maceo et Melvin tentent de l'approcher. Ils cherchent une limousine, finissent par la trouver et attendent que James en sorte. Melvin rappelle à JB leur rencontre un an plus tôt : la proposition est donc honorée, James Brown lui propose de l'écouter à nouveau et l'engage. Puis Melvin présente son petit frère à JB : "Voici mon frère Maceo, il joue du saxophone et cherche aussi du travail". James Brown lui demande alors s'il possède un saxophone baryton et Maceo répond "Ahhh oui Mr Brown !", un mensonge puisqu'il joue alors du ténor... Reste maintenant à trouver un baryton s'il veut rejoindre son frère Melvin dans cette aventure. Maceo se souvient que son frère et lui pensaient jouer avec JB durant 6 mois avant de reprendre le chemin de l'école. Et Maceo de rire... "Nous sommes restés bien plus longtemps que ça !"...
"Maceo, I want you to blow !"
Le premier solo de Maceo très remarqué est enregistré sur "Papa's got a brand new bag" en 1965. Suivent ensuite ceux sur "I Feel Good", "Cold Sweat", "Sex Machine"... Maceo anime tous ces tubes de JB avec ses solos dont il a le secret. "Maceo, I want you to blow !" scande James ; le style de Maceo a permis de définir l'empreinte "funk" du Godfather. Il a fait sa place dans le groupe jusqu'à devenir rapidement l' un des piliers incontournables du groupe pendant plus de 20 ans... Avec le recul, Maceo se souvient de cette période de sa vie comme un véritable apprentissage un peu "comme à l'université", où rigueur, discipline et sanctions à la première faute sont de mises ; un véritable contraste avec ses prochaines aventures auprès de George Clinton et de Bootsy Collins.
Maceo dans les albums de James Brown : 1964 "Out of Sight Sax" (sax bariton) - 1969 "Say It Loud, I'm Black and I'm Proud (sax ténor)" - 1970 "Sex Machine Organ" (sax ténor) - 1972 "Get on the goog foot" (sax ténor) - 1973 "Payback" (flute) - 1974 "Hell" (sax alto) - 1975 "Reality" (sax alto) - 1986 "Gravity" (sax alto) - 1986 "In the Jungle Groove" (sax ténor) - 1988 "Funky People Pt2" (sax alto et ténor) - 1991 "messing with the blues" (sax alto et ténor) - 1991 "Star Time" (sax bariton et ténor).
COLLINS, CLINTON & CO
Les années JB sont ponctuées de plusieurs interruptions qui mènent Maceo vers d'autres rencontres. La première, son service militaire qu'il effectue en Europe entre 1966 et 1968. En 1970, il fonde le groupe "Maceo & All King's Men" avec d'autres membres du groupe de JB et enregistre les 2 albums « Doing their own things » et « Funky Music Machine », restés des collectors encore 30 ans plus tard...
Entre temps, James Brown crée le nouveau label "People" pour produire les albums de ses musiciens : ce sera le cas de l'album "Us" de Maceo sous ce label, de plusieurs singles de "Maceo & the Macks", et les 3 albums "Funky People" sur lesquels ont retrouve les titres de son sax alto. Maceo revient jouer chez JB en 1974, et rejoint ainsi les "JB's" avec ses amis Fred Wesley et Pee Wee Ellis.
Dès 1976, Maceo quitte de nouveau James pour travailler avec d'autres figures emblématiques du Funk : Bootsy Collins avec "The Horny Horns" au sein de son groupe "Bootsy’s Rubber Band" ; et avec Georges Clinton, traversant les différentes périodes Funkadelic et Parliament, les P-Funk. Des shows époustouflants de James Brown à l'atterrissage du vaisseau "Mothership" de Clinton, Maceo est toujours de la partie, vivant certains instants les plus excitants de l'histoire de la musique et apportant son "son" comme constante référence. Maceo continuera pendant des années durant, à jouer pour James Brown, George Clinton, Bootsy Collins, ainsi qu'avec Fred Wesley & the JB's.
Maceo dans les albums (6) de Bootsy Collins : 1976 "Stretchin' Out" - 1977 "Ahh...The Name Is Bootsy, Baby!" - 1979 "This Boot Is Made for Fonk" - 1980 "Ultra Wave Horn" - 1988 "What's Bootsy Doin'?" - 1994 "Blasters of the Universe"
Maceo dans les albums (14) de Georges Clinton et de Parliament/Funkadelic : 1976 Parliament "Clones of Dr. Funkenstein" et "Mothership Connection" - 1977 Parliament "Live : P-Funk Earth Tour" et "Funkentelechy Vs the Placebo Syndro" - 1978 Parliament "Motor Booty Affair" - 1979 Parliament "Gloryhallastoopid" - 1980 Parliament "Trombipulation" - 1983 P-Funk All Stars "Urban Dancefloor Guerillas" - 1983 G.Clinton "You Shouldn't-Nuf Bit Fish" - 1985 G.Clinton "Some of My Best Jokes Are Friends" - 1990 P-Funk All Stars "Live at the Beverly Theatre" - 1993 G.Clinton ""P" Is the Funk" et "Plush Funk fender rhodes" - 1995 Parliament "Best of Parliament : Give Up the Fun".
La carrière solo tant attendue : "Everything's coming up Maceo" (DownBeat Magazine)
En 1990, Maceo Parker décide de se concentrer sur ses propres projets. Il sort 2 albums solo qui remportent immédiatement un grand succès : "Roots Revisited" en 1990 (classé durant 10 semaines en tête du prestigeux classement Billboard Magazine catégorie Jazz et consacré meilleur artiste jazz de l'année) puis "Mo Root's" en 1991. "Tout arrive Maceo" écrit le Downbeat Magazine lorsque Maceo décide enfin de se lancer en son nom. A cet instant, Maceo est reconnu comme un "sideman", une référence pour ceux qui le connaissent en tant que saxophoniste de telle ou telle vedette.
En 1992, Maceo sort un troisième album qui restera une référence pour les fans : l'enregistrement live "Life on Planet Groove", un véritable succès qui a boosté sa carrière. De cet album sort un slogan qui définit bien les ingrédients de sa musique : "2% Jazz, 98% Funky Stuff !". Maceo sait manipuler avec précision ces ingrédients pour rendre sa funk encore plus accessible : le bon équilibre entre la rigueur très pro acquise à l'école Brown et le fun pratiqué à l'école Clinton. La formule est un véritable succès encore aujourd'hui.
Les albums de Maceo continuent de sortir au rythme de sa créativité : "Southern Exposure" en 1994 et "Soundtrack" en 1995… Les dates de concerts à travers le monde s'enchaînent...
Il faut ensuite attendre 4 ans pour que Maceo sorte un nouvel album qui fera à nouveau date dans l'histoire de l'artiste, album très prisé des fans : "FunkOverload" sort en 1998. En 1999, Maceo trouve quelques rares créneaux disponibles pour répondre "présent" à la demande de Prince qui le veut pour son album et sa tournée mondiale. L'expérience sera d'ailleurs reconduite pour ses prochaines tournées.
Tout comme "FunkOverload", les albums suivants "Dial Maceo" (2000) et "Made by Maceo" (2003) entrent dans le top 40 des hits-parade européens lors de leur sortie dans les bacs. Sur "Dial Maceo", des invités de marques le rejoignent, tels que la maîtresse de la musique Folk alias Ani DiFranco, Prince et un autre James différent de celui auquel on associe Maceo : James Taylor. En 2003, lors des "Rhythm & Blues Foundation Awards", Maceo reçoit un prix pour sa contribution au Rhythm&Blues.
En 2005, il enregistre "School's In!", nouvel album aussi Funky qu'un album puisse être. Puis vient une nouvelle opportunité dans la carrière de l'artiste, un autre rêve se réalise pour Maceo : travailler avec un big band sur un hommage à Ray Charles. En 2007, le WDR Big Band (vainqueur d'un Grammy Awards en 2007) et Maceo donnent une série de concerts exceptionnels en 2 parties : l'incroyable succession des tubes de Ray Charles interprétés par Maceo, puis une réécriture "Big Band" des titres phares de Maceo, tout de même accompagné de son bassiste Rodney Skeet Curtis et de l'excellent batteur Dennis Chambers. Un double album live sort de cette expérience unique, "Roots and Groove" ainsi qu'un dvd du même nom.
Pas une année sans tournée, plus de 200 dates par an, 3 heures de concerts en moyenne, pas un continent n'échappe à Maceo, le nombre de pays fréquentés ferait rougir plus d'un artiste. "Je sens qu'il est de mon devoir d'artiste de me rendre partout où je puisse aller, surtout lorsque les gens veulent me voir". Sur scène, la douce voix de sa Caroline du Nord natale ne sort pas d'une couche (ndlr - en référence à George Clinton) ou à une cape de velours tourbillonnants (ndlr - en référence à JB), pas de vaisseaux spaciaux géants ou 50 personnes autour de lui. Rien d'autre que le coeur de son âme Soul qu'il ouvre à chaque fois qu'il souffle dans son saxophone... 20 années exceptionnelles de carrière solo se sont déroulées : ce nouvel empire du Funk, le sien, est apprécié en tant que tel, sans jamais renier le passé. Il navigue entre la soul des années 60 de JB et l'étrange funk des années 70 de George Clinton, tout en explorant le jazz et le hip-hop. Et c'est ce mélange qui permet à Maceo d'afficher "complet" à chacun de ses concerts...
Maceo Parker est né un 14 février, jour de la St Valentin. Et c'est peut-être là la clef de son succès : il aime la musique qu'il joue, il aime les gens avec qui il la joue, et il aime les gens pour qui il la joue.